vendredi 11 avril 2025

TEXTE D'ATELIER D'ÉCRITURE — quelque part dans la nuit

Mouches agitées, une seule s’éloigne, attirée par la lumière du lampadaire qui s’allume. Le lampadaire éclaire le rétroviseur d’une vieille camionnette blanche. Dans le rétroviseur, le reflet de l’hiver trébuche sur le pétale d’une pâquerette. La friterie rouvrira bientôt, on célébrera les premiers rayons de soleil à la bière de table, sel sur les doigts. La pâquerette ne portera dans son petit corps ni les mondanités de la solitude ni l’insolence des longues pluies. Sur la place, le manège de chevaux de bois s’est arrêté de tourner. Le vent essuie les yeux des bêtes. Essuie les corps lourds de ce qu’il reste du bruit de la journée : le marché, les klaxons, les cloches de l’église. Aux fenêtres des maisons, derrière un rideau mal tiré ou un simple vitrage, on recouvre de la vaisselle de papier journal, on malaxe de la terre glaise, on plie du linge, on épluche des poireaux, on tape au marteau sur un clou, on arrose une plante verte, on déplie une carte routière, on caresse une joue. Et dans la maison en briques rouges, fin du tango argentin et dernier feu de bois. La gamine recouvre une de ses peluches sans têtes d’une poignée de sable ramassé sur une plage de Bray-Dunes l’été dernier. Elle dit que la mer viendra la chercher cette nuit, qu’il lui faudra faire un vœu.

Texte écrit dans le cadre des ateliers d'écriture de François Bon.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire